Newsletter 45 (Septembre 2013)

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Dans cette Newsletter cd2-conseils, nous allons détailler le dernier bilan annuel des expositions professionnelles aux rayonnements ionisants publié par l’IRSN, rappeler l’utilité du port d’un dosimètre et présenter les modifications apportées à la fiche d’aptitude.

Bilan des expositions professionnelles en 2012

L’IRSN a publié le Bilan 2012 des expositions professionnelles aux rayonnements ionisants. Il rassemble les résultats de la surveillance des expositions professionnelles aux rayonnements ionisants, pour l’ensemble des activités civiles et de défense. Il en ressort une augmentation régulière du nombre de travailleurs suivis et une stabilité globale des expositions sur les 5 dernières années.
Nous allons plus particulièrement détailler les points en relation avec le domaine dentaire.

Les travailleurs susceptibles d’être exposés aux rayonnements ionisants doivent porter un dosimètre. Le bilan reprend l’ensemble des valeurs relevées par ces dosimètres, quel que soit le laboratoire de dosimétrie (IRSN, Landauer …), dans 5 domaines d’activités :

  • activités médicales (incluant le dentaire) et vétérinaires,
  • nucléaire,
  • industrie non nucléaire,
  • recherche et enseignement,
  • autres.

Toutes ces données sont enregistrées dans le Système d’Information de la Surveillance de l’Exposition aux Rayonnements Ionisants (SISERI) qui constitue un outil très efficace pour connaître les évolutions des doses reçues par l’ensemble des travailleurs.

Evolution de l’effectif surveillé
Le nombre de travailleurs surveillés en 2012, soit 354 665, est en augmentation de 3% par rapport à 2011. Globalement, on retient sur la période 2008-2012 une progression régulière de la population de travailleurs suivis, de l’ordre de 4% chaque année. Cette progression est principalement due à l’augmentation du nombre de travailleurs suivis dans le domaine des activités médicales et vétérinaires, et dans une moindre mesure dans le domaine nucléaire.

L’effectif suivi dans les cabinets dentaires fait partie de la catégorie « activités médicales et vétérinaires ». L’effectif des travailleurs suivis dans les cabinets dentaires augmente plus rapidement que l’effectif total. Néanmoins, les évolutions à deux chiffres que nous rencontrions il y a quelques années ne sont plus retrouvées sur les deux dernières années. La progression entre 2011 et 2012 est de 4%.


Evolution de l’effectif surveillé total et de l’effectif surveillé dans le domaine dentaire.

Evolution de l’exposition
L’exposition externe individuelle moyenne sur l’ensemble de l’effectif surveillé est comparable à celle des années passées : 0,18 mSv (millisievert) en 2012 alors qu’elle était de 0,19 mSv en 2011 et 2010.
En ce qui concerne le domaine dentaire, l’exposition externe individuelle moyenne est encore plus faible : 0,04 mSv.

En ce qui concerne l’effectif total exposé, c’est-à-dire celui pour lequel la dose est supérieure au seuil d’enregistrement, la dose individuelle annuelle moyenne est de 0,85 mSv. Dans le domaine dentaire, la moyenne des doses reçues par les porteurs de dosimètres pour lesquelles des doses ont été relevées est de 0,38 mSv. Ces personnes sont exposées, certes faiblement en moyenne, mais le fait qu’elles portent des dosimètres permet de connaître précisément les valeurs d’exposition, de s’assurer que celles-ci sont bien inférieures aux limites réglementaires et en cas d’accident ou d’incident, de connaître précisément les doses prises par ces travailleurs.

On peut remarquer que cette exposition moyenne est très inférieure à 1 mSv et qu’il ne faut donc pas considérer cette valeur comme une limite à partir de laquelle il faut porter un dosimètre.
Une surveillance de l’exposition des travailleurs aux rayonnements ionisants est mise en œuvre dès lors que ceux-ci sont susceptibles d’être exposés à un risque dû aux rayonnements ionisants.

Sur les 354 665 travailleurs surveillés, 96,1 % ont reçu une dose individuelle annuelle, du fait de leur activité professionnelle, inférieure à 1 mSv, limite annuelle réglementaire fixée pour la population générale.
Dans le domaine dentaire, il en est de même. L’immense majorité des travailleurs qui portent un dosimètre (plus de 99%) reçoit une dose inférieure à 1 mSv.


Proportion des travailleurs surveillés recevant une dose inférieure à 1 mSv dans le domaine dentaire et dans l’effectif total.

Si l’on partait du principe que les personnes qui reçoivent des doses inférieures à 1 mSv par an ne doivent plus porter de dosimètre, on ne suivrait que moins de 5% de l’effectif suivi actuellement. Il serait alors impossible de connaître précisément les conditions de radioprotection dans les différentes activités et de suivre l’évolution des pratiques.


Exposition individuelle moyenne dans les différents secteurs d’activité et au sein des activités médicales et vétérinaires.

Comme permet de le visualiser le schéma ci-dessus, le domaine dentaire fait partie de ceux pour lesquels les doses moyennes sont les plus faibles. Mais les niveaux de doses rencontrés dans nos cabinets ne constituent pas en soi une exception. Il y a d’autres activités et d’autres domaines dans lesquels les doses sont aussi faibles si ce n’est plus faible et pour lesquels le nombre de travailleurs suivi est aussi très important.

En ce qui concerne les cabinets dentaires, le nombre de travailleurs qui reçoivent une dose de plus de 1 mSv est faible (182 cas). Il n’est pas surprenant de remarquer que ceux-ci sont surtout concentrés dans l’intervalle de 1 à 6 mSv. Il est par contre incompréhensible qu’un nouveau dépassement de limite réglementaire ait été relevé alors que cela semble « théoriquement et mathématiquement » impossible. Nous avions consacré un article pour expliquer cela dans la Newsletter 16 d’Avril 2011.


Surveillance de l’exposition externe dans le domaine dentaire de 2003 à 2012.

Conclusions

Le nombre de dosimètres portés dans les cabinets dentaires croît encore, mais plus lentement que les années précédentes. Il faut donc redoubler d’efforts pour faire comprendre aux praticiens employeurs, responsables de la sécurité de toute l’équipe du cabinet que le port de dosimètres est nécessaire pour eux-mêmes et leurs assistantes.

C’est en augmentant le nombre de dosimètres portés que nous aurons une vision juste des conditions d’application des principes de radioprotection dans nos cabinets. Cela aura un intérêt pour l’ensemble de la profession qui plaide pour une mise en adéquation de la réglementation aux risques réels rencontrés dans les différentes activités faisant appel aux rayonnements ionisants.
A titre individuel, le chirurgien-dentiste employeur respectera ses obligations en diffusant une culture radioprotection et en faisant porter des dosimètres aux personnes susceptibles d’être exposées à un risque dû aux rayonnements ionisants.


Obligations en matière de suivi dosimétrique​

Le suivi dosimétrique des praticiens et des assistantes est indispensable. En effet, conformément aux dispositions du Code du travail, une surveillance de l’exposition des travailleurs aux rayonnements ionisants est mise en œuvre dès lors que ceux-ci sont susceptibles d’être exposés à un risque dû aux rayonnements ionisants.
Nous allons éclaircir certains points, parfois mal compris, qui amènent des confrères à ne pas respecter leurs obligations.

L’article R4451-1 définit le champ d’application de la prévention des risques d’exposition aux rayonnements ionisants :

Les dispositions du présent titre s’appliquent, dans le respect des principes énoncés à l’article L1333-1 du Code de la santé publique, dès lors que des travailleurs sont susceptibles d’être exposés à un risque dû aux rayonnements ionisants :
1° Résultant d’activités nucléaires soumises à un régime d’autorisation ou de déclaration en application de l’article L1333-4 du Code de la santé publique …

Cette surveillance s’applique à tous les travailleurs, salariés ou non-salariés (article R4451-9 du Code du travail).

Article R4451-9
Le travailleur non-salarié exerçant une activité mentionnée à l’article R4451-4 met en œuvre les mesures de protection vis-à-vis de lui-même comme des autres personnes susceptibles d’être exposées à des rayonnements ionisants par son activité.
A cet effet, il prend les dispositions nécessaires afin d’être suivi médicalement dans les conditions prévues à la section 4.
Il faut remarquer que c’est la dernière phase de cet article qui impose un suivi médical par un médecin du travail aux chirurgiens-dentistes libéraux.

A des fins de mise en place de la surveillance du travailleur, l’employeur procède à une analyse des postes de travail qui est renouvelée périodiquement et qui doit comprendre une étude dosimétrique de ces postes (article R4451-11 du Code du travail).

Sur la base de ces analyses, l’employeur (et non la PCR) procède au classement radiologique du travailleur. A ce sujet, nous insistons de nouveau sur le fait que c’est l’employeur et non la PCR qui est responsable du respect de la réglementation.

Le travailleur susceptible de recevoir, dans les conditions habituelles de travail, une dose efficace supérieure à 6 mSv par an ou une dose équivalente supérieure aux 3/10èmes des limites annuelles d’exposition est classé en catégorie A, sinon il est classé par défaut en catégorie B (articles R4451-44 et 46 du Code du travail).

Article R4451-46
Les travailleurs exposés aux rayonnements ionisants ne relevant pas de la catégorie A sont classés en catégorie B dès lors qu’ils sont soumis dans le cadre de leur activité professionnelle à une exposition à des rayonnements ionisants susceptibles d’entraîner des doses supérieures à l’une des limites de dose fixées à l’article R1333-8 du Code de la santé publique.
Même si, par le calcul et de façon purement théorique, l’analyse de poste de travail aboutit à une dose inférieure à 1 mSv, cela n’est pas suffisant pour déclarer qu’un travailleur n’appartient pas à la catégorie B. Cette approche, trop expéditive et qui ne respecte pas la réglementation, doit être abandonnée.
Pour ne pas être classé en catégorie B, il faudrait en plus pouvoir assurer que l’activité professionnelle du travailleur ne soit en aucun cas susceptible d’entraîner des doses supérieures aux limites réglementaires.

C’est là que le Bilan 2012 des expositions professionnelles aux rayonnements ionisants en France publié par l’IRSN et que nous avons évoqué dans l’article ci-dessus s’avère intéressant.

En consultant le dernier tableau de cet article, on constate aisément qu’un nombre significatif de praticiens et/ou d’assistantes a dépassé l’une des limites. Un cas de dépassement de la limite réglementaire des 20 mSv a même été relevé.

Le suivi dosimétrique individuel doit être adapté au type de risque d’exposition du travailleur (article R4451-62 du Code du travail). Lorsque le travailleur est exposé à un risque d’exposition externe, il est suivi par une dosimétrie externe passive.
Dans ces conditions, il n’est pas possible de s’exonérer du port d’un dosimètre et ceux-ci sont à faire porter par les patriciens et leurs assistantes dans l’immense majorité des cabinets dentaires.

Le suivi dosimétrique individuel a notamment pour objectif de vérifier que le travailleur ne dépasse pas l’une des limites annuelles réglementaires de dose rappelées dans les articles R4451-12 et 13 du Code du travail.

Conclusions
En appliquant correctement la réglementation, de très nombreux travailleurs sont pourvus d’un dosimètre alors que dans des conditions habituelles de travail, ils ne reçoivent que de très faibles doses.

En ne s’en tenant qu’à la limite des 1 mSv pour classer les travailleurs, plus de 96% de l’ensemble des travailleurs ne bénéficieraient plus d’un suivi dosimétrique.
Dans le domaine dentaire, l’analyse de poste de travail conclut quasi systématiquement à des évaluations de doses inférieures à 1 mSv. Certaines PCR en concluent que le port d’un dosimètre n’est alors pas nécessaire et influencent de façon erronée le chirurgien-dentiste employeur qui suit ces préconisations. En s’en tenant à cette approche fautive, il n’y aurait plus de dosimètre dans les cabinets dentaires. Il serait alors impossible de s’assurer que les limites ne sont pas dépassées.

Nous n’aurions aucune information sur les conditions réelles d’expositions dans nos cabinets dentaires. Est-ce cela que nous voulons ou souhaitons-nous pouvoir exercer nos obligations de chirurgiens-dentistes employeurs sereinement dans le respect de la réglementation et pour le bien de tous ?


Nouveau modèle de fiche d’aptitude

Un arrêté du 20 juin 2013 fixe le nouveau modèle de la fiche d’aptitude délivrée par le médecin du travail à l’issue des examens médicaux. La modification du modèle-type s’inscrit dans la réforme de la médecine du travail, qui a renforcé le suivi individuel de l’état de santé des travailleurs.​
​Voyons en quoi le nouveau modèle de fiche va nous intéresser.

Pour mémoire, tout examen médical en santé au travail donne lieu à la délivrance d’une fiche médicale d’aptitude, y compris à l’occasion d’un examen à la demande du salarié ou de l’employeur. Seules les visites de préreprises ne sont pas mentionnées sur cette fiche médicale d’aptitude puisqu’elles ne donnent pas lieu à la délivrance d’un avis d’aptitude, le médecin du travail formule seulement des préconisations en vue de la reprise du travail, l’avis d’aptitude à proprement parler, est délivré lors de la visite médicale de reprise.

Maintenant, la fiche d’aptitude est unifiée, quel que soit le type d’examen réalisé (examen d’embauche, examen périodique, examen de reprise, ou examen à la demande). Elle permet de préciser les conclusions relatives à l’aptitude ou l’inaptitude du salarié au poste de travail que seul le médecin du travail peut constater.
Cette modification fait suite à la réforme de la médecine du travail qui a renforcé le suivi individuel de l’état de santé des travailleurs.


Nouveau modèle de fiche d’aptitude.

 

Le décret de juillet 2012 a imposé de faire figurer sur toutes les fiches médicales d’aptitude, la date de la dernière mise à jour de la fiche d’entreprise, et la date de l’étude de poste.

Cette obligation de faire figurer la date de la dernière mise à jour de la fiche d’entreprise et de l’étude de poste existait déjà depuis 2010, pour les salariés exposés aux rayonnements ionisants.

Article R4451-82
Un travailleur ne peut être affecté à des travaux l’exposant à des rayonnements ionisants qu’après avoir fait l’objet d’un examen médical par le médecin du travail et sous réserve que la fiche médicale d’aptitude établie par ce dernier atteste qu’il ne présente pas de contre-indication médicale à ces travaux.
Cette fiche indique la date de l’étude du poste de travail et la date de la dernière mise à jour de la fiche d’entreprise.

Fiche d’entreprise ou d’établissement
Le médecin du travail établit une fiche d’entreprise pour chaque entreprise ou établissement qu’il a en charge. Il y consigne les risques professionnels existants et les effectifs qui y sont exposés. Cette fiche permet un repérage rapide des risques dans l’entreprise.
En pratique de très nombreux cabinets dentaires n’ont pas encore reçu la visite du médecin du travail pour l’établir.

Article D4624-37
Pour chaque entreprise ou établissement, le médecin du travail établit et met à jour une fiche d’entreprise ou d’établissement sur laquelle figurent, notamment, les risques professionnels et les effectifs de salariés qui y sont exposés.

Article D4624-38
Pour les entreprises adhérentes à un service de santé au travail interentreprises, la fiche d’entreprise est établie dans l’année qui suit l’adhésion de l’entreprise ou de l’établissement à ce service.

Article D4624-39
La fiche d’entreprise est transmise à l’employeur. …

Il est vraisemblable que d’ici la prochaine visite d’un des travailleurs du cabinet chez le médecin du travail, celui-ci vous demande un rendez-vous pour établir la fiche d’entreprise de votre cabinet.

Nous rappelons à ce sujet que les employés du cabinet mais aussi les praticiens libéraux sont concernés par le suivi médical par un médecin du travail.
La venue du médecin du travail est un moment idéal pour lui faire découvrir les conditions de travail dans votre cabinet. Vous pourrez échanger avec lui en sachant que les médecins du travail n’ont pas vocation à sanctionner et sont là pour aider les employeurs à respecter leurs obligations.

Lors de sa venue, le médecin du travail peut être amené à vous demander certains documents. Nous vous en fournissons une liste, pas nécessairement exhaustive, mais qui vous permettra tout de même de rechercher à l’avance ces documents :

  • le document unique d’évaluation des risques (mise à jour annuelle),
  • les résultats de vérification ou des contrôles (rapports de vérification des installations électriques, des générateurs de rayons X …),
  • les fiches de données de sécurité (FDS) des produits dangereux,
  • et s’ils existent :
  • les fiches de description de poste,
  • le registre des mises en demeure et observations de l’inspection du travail,
  • le registre des accidents de travail bénins,
  • le règlement intérieur,

Nous vous rappelons que le Document Unique d’évaluation des risques est un document indispensable à la maitrise de la sécurité dans votre cabinet dentaire.
Vous pouvez utiliser les documents mis à votre disposition sur le site (rubrique Ressources > Téléchargements) ou le faire de façon électronique sur le site DocRéglo©.
Un article et la Newsletter 23 (Novembre 2011) ont été consacrés à ce sujet.

Etude de poste
L’étude de poste est réalisée par le chirurgien-dentiste PCR. Elle permet d’estimer les doses qui seront prises par les personnes susceptibles d’être exposées à un risque dû aux rayonnements ionisants. Ce document permet de classer ces personnes. Il doit être renouvelé annuellement pour tous les travailleurs du cabinet. C’est une partie de la déclaration des générateurs de rayons X.
Vous pouvez utiliser les documents mis à votre disposition sur le site ou le faire de façon électronique sur le site DocRéglo©.

Conclusions
Le nouveau modèle de fiche d’aptitude va entraîner des échanges plus réguliers entre les chirurgiens-dentistes employeurs et les médecins du travail. C’est une évolution positive et le fait de pouvoir discuter avec le médecin du travail lors de son passage dans votre cabinet constitue un moment d’échange intéressant qui permettra de mieux connaître et comprendre ses missions.

Nous espérons que cette Newsletter cd2-conseils vous a plu et nous attendons vos remarques et suggestions pour l’améliorer.

Bien cordialement,

L’Equipe cd2-conseils